Un Boa dans un jardin : attention à la désinformation!
Le 20 mai, un reportage a été diffusé sur France 3 suite à la découverte et la capture par les pompiers d’un Boa dans un jardin de Bourg-de-Péage dans la Drôme. Ce n’est pas le premier, ça ne sera pas le dernier… mais les propos des journalistes et de la maire de la commune montrent la grande méconnaissance en ce qui concerne à la fois les serpents et la règlementation sur l’élevage de ces animaux.
Il semble que madame la Maire a été mal informée sur la réglementation en vigueur pour la détention d’animaux non domestiques, en particulier sur les modalités fixées par l’arrêté du 10 aout 2004.
En effet, vous dites dans ce reportage que la détention de ce Boa (un
Boa constrictor imperator) est illégale : c’est une erreur. Certes, c’est une espèce protégée au niveau mondial par la Convention de Washington, mais il est en annexe II de la CITES, un niveau de protection – ou plutôt de réglementation du commerce – assez souple qui autorise sous conditions sa vente (quotas pour les importations hors UE, vente libre pour les spécimens nés en captivité au sein de l’UE sous réserve de fournir des justificatifs de leur naissance en captivité). En France, comme ailleurs en Europe, il est très facile d’acheter dans une animalerie ou chez un éleveur ce serpent qui au demeurant, malgré sa taille, est inoffensif (alors que le reportage le montre comme un monstre féroce). Ainsi, on peut accuser le propriétaire mystérieux de ce serpent d’incompétence car un terrariophile consciencieux verrouille ses terrariums pour éviter les évasions. Toutefois, il est faux au regard de la loi de dire que c’est illégal. La détention des reptiles en France est légale, règlementée certes comme toute activité d’élevage, mais légale. De plus, madame la Maire dit que cet animal aurait dû être équipé d’un transpondeur (une puce injectée sous la peau et qui permet l’identification) or
Boa constrictor imperator ne fait pas partie des espèces soumises à l’obligation de « puçage ».
L’abandon ou l’évasion d’animaux de compagnie dans la nature ou chez des voisins est un problème écologique, de santé et de sécurité publique, les reptiles ne sont qu’une petite partie de ce problème. Les accidents liés à des serpents exotiques en France se comptent sur les doigts d’une main, et aucun n’a encore concerné un tiers autre que le propriétaire du serpent. On ne peut pas en dire autant du meilleur ami de l’Homme : les morsures de chiens sont à l’origine de 66 000 hospitalisations par an dans notre pays. Pourtant, quand le chien du voisin s’échappe, il ne fait pas l‘objet d’un reportage télévisé. Le traitement médiatique des évasions de serpent est avant tout lié aux préjugés ancestraux et irrationnels que véhicules ces animaux, stars des mal-aimés ! Ces préjugés n’ont aucune assise scientifique, c’est un héritage culturel et religieux tenace qui est très souvent préféré à un discours rationnel et objectif.
Les reportages subjectifs traitant de terrariophilie ou de serpents découverts dans la nature peuvent ruiner en quelques minutes des années d’efforts en matière de sensibilisation de la part des herpétologues, animateurs natures, auteurs et chercheurs pour démystifier le serpent et montrer qu’il fait bien plus de peur que de mal. Dans ce reportage on voit des gens qui se disent être terrorisés, ayant peur que le serpent leur bondisse dessus, qui se sont calfeutrés chez eux alors que ce serpent semblait plus apeuré qu’agressif. En aucun cas le commentateur n’a relativisé les propos de ces voisins effrayés.
L’assimilation inexacte mais coutumière de l’élevage des reptiles à une activité illégale stigmatise les terrariophiles. Du coup, d’entre eux se cachent, non pas parce qu’ils ne sont pas en règle avec la loi, mais par crainte de la vindicte populaire et médiatique !
Les terrariophiles consciencieux et les herpétologues, s’efforcent à la fois de briser les préjugés ésotériques liés aux serpents, de combattre certaines dérives de la mode du reptile comme animal de compagnie mais aussi de montrer que la terrariophilie est une discipline d’élevage comme une autre, tout aussi honorable que l’élevage des chevaux ou l’aquariophilie et qu’elle ne mérite pas les jugements de valeur dont elle est victime. Certes il y a des gens qui font n’importe quoi, mais ce n’est pas parce qu’il y a des chauffards qu’il faut considérer que tous les automobilistes sont des dangers publics.
Vincent NOËL.
Voir le reportage :
http://www.francetvinfo.fr/animaux/video-une-famille-de-la-drome-decouvre-un-boa-constrictor-dans-son-jardin_604899.html
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